Typage Camille Hardouin, hypothèse d'un ennéatype 6

Typage Camille Hardouin

Après avoir analysé la chanson Si Demain de Camille Hardouin sous l’angle de l’expression du style de communication « Limites » propre à l’ennéatype 6, j’avais envie d’approfondir la question du typage de l’autrice. J’avais visionné un petit documentaire, dans lequel peu de choses avaient attiré mon attention – si ce n’est qu’elle commentait un moment où elle recherche des habits de scène (qui sont très excentriques) en soulignant que l’originalité était une qualité attendue dans son milieu professionnel. Cela suggérait que sa motivation était plus un souci de conformité et d’adaptation qu’une motivation en soi, ce qui avait jeté un doute sur mon hypothèse initiale de type 4…

J’ai découvert sur sa chaîne YouTube plusieurs vidéos où Camille Hardouin se filme lisant des textes concernant sa vie personnelle. C’est sur la base de trois d’entre eux que j’ai tenté de confirmer l’hypothèse d’un type 6.

Dans le premier, Dormir https://www.youtube.com/watch?v=FPhKJNZMWIM

elle évoque son rapport au sommeil, plombé par des insomnies récalcitrantes ; elle mentionne un incendie survenu durant la nuit dans son enfance comme source d’une ultra vigilance qui constituerait une explication à ses difficultés de sommeil, particulièrement éprouvantes quand elle est seule ; puis elle relate un incident récent (elle a entendu un bruit de clé dans sa serrure la nuit) qui a réactivé l’insomnie et provoqué des réactions considérables chez elle de panique et stratégies de protection…

J’ai retranscrit la majeure partie du texte de la vidéo et regroupé sous plusieurs thèmes les aspects cohérents avec une hypothèse d’ennéatype 6.

Solitude et appel aux autres

« Je suis pas seule , pas vraiment […] (il s’agit de son chat, elle évoque en fait l’absence de son compagnon) alors je suis pas assez rassurée pour dormir, je monte la garde »

A propos de la nuit :

« un moment où on ne peut plus appeler personne et où il faut se taire »

(ce dernier point m’évoque l’importance du mental impliqué dans la peur et la vigilance)

« Alors que le reste des gens s’était évanoui dans l’inconscience il fallait bien que quelqu’un reste »

On retrouve le contraste entre la solitude et le groupe, la vigilance étant liée à une activité du mental (ce n’est pas seulement l’éveil, c’est la conscience qui est pointée).

Parlant de ses stratégies antérieures pour lutter contre l’insomnie, elle évoque un appel aux autres pour qu’ils partagent leurs représentations du sommeil (là encore, appel au collectif et stratégie mentale sont associées).

« J’ai fait comme quand j’ai voulu aimer quelque chose que je ne comprenais pas (le vin, les matchs de rugby, les mariages, tant de choses qui me semblaient étrangères …) et que j’ai appris à aimer à travers les yeux des autres , j’ai demandé à chacun ce qu’il aimait dans « dormir ».

Quand l’incident de la clé dans la porte survient, les autres sont massivement sollicités- comme on verra dans le thème suivant (et au passage, elle préfère le titre original de Maman j’ai raté l’avion qui fait référence à la solitude) :

« J’ai mis des bouteilles devant la porte sur les conseils des copains rigolards pour faire comme dans Home Alone. »

Peur, angoisse, vigilance

Une première citation évoquait Camille dans son rôle de veilleuse, il y en a plusieurs mentions ensuite :

Après le récit de l’incendie survenu dans l’enfance : «

depuis je montais la garde luttant contre le sommeil de peur que quelque chose n’arrive »

Après le récit de la clé dans la serrure et des mesures extensives prises :

« Je n’ai pas pleuré […] La raison que tout s’écroule si on se laisse aller, pour cette raison- là. […] (je souligne pour le vocabulaire mental) A la source des larmes, il y a aussi un petit soldat, une version miniature de moi habillée en petit soldat qui monte la garde, toujours. »

L’émotion de peur est évoquée de façon paroxystique :

« Le renversement de ça en une angoisse aiguë , insupportable, insurmontable, où chaque seconde est une seconde de douleur, la peur tellement forte que le ventre en est tordu, que le visage est crispé, que tout l’esprit est comme gelé dans cette peur , comme dans les photos d’ambre jaune des livres de fossiles que j’aimais tellement. »

« J’ai paniqué , j’ai eu peur pour mon corps, peur de revivre une agression »

Le sommeil lui-même est évoqué dans sa relation avec la protection :

« Je commence à me dire que je comprends ce délice du sommeil, ce refuge dans son propre royaume imaginaire »

Le mental et sa bascule

J’ai déjà relevé à quelques reprises un vocabulaire ou des stratégies mentales en relation avec une situation émotionnelle, il y a plusieurs exemples de mental en surchauffe - outre la surréaction pour un incident où un voisin s’est probablement trompé de palier après une soirée tardive :

«J’ai tout de suite pensé à mes guitares aussi, « est-ce que c’est possible qu’on me les prenne alors que je suis là pour les défendre ?» . J’ai aussi pensé « mais pourquoi mais pourquoi j’ai jamais dit oui toutes ces fois où on m’a proposé de participer à ces cours d’autodéfense féministes ?»

La formule « l’esprit est comme gelé dans cette peur , comme dans les photos d’ambre » évoque elle aussi la bascule du mental.

Concernant les stratégies mises en œuvre, elles sont clairement sous l’emprise de la surenchère et de la démesure :

« J’ai mis les cartons de carrelage qui restaient devant la porte pour la bloquer. »

« J’ai mis des bouteilles devant la porte sur les conseils des copains rigolards pour faire comme dans Home Alone. »

« J’ai appelé tous mes amis, j’ai appelé un serrurier, j’ai appelé les gens de l’immeuble pour changer le code, j’ai contacté les voisins. »

Passons maintenant à la seconde vidéo , Je comprends les oiseaux

Dans celle-ci, qui évoque l’état amoureux, c’est la prégnance du vocabulaire mental qui est particulièrement marquante. Voici la transcription intégrale avec les passages en gras :

« Je suis en train de tomber en amour et c’est une chute tellement libre.

si c’est ce sentiment, je comprends pourquoi les gens achètent des parachutes je comprends pourquoi les gens se jettent du haut des falaises

si c’est ce sentiment je comprends pourquoi les oiseaux existent et pourquoi on a inventé la faim.

Je comprends ça et plus rien d’autre.

Aller à la boulangerie est devenu une épopée rocambolesque.

Le monde est un vertige, le centre du monde s’est déplacé, je pense qu’il n’existait pas avant, que j’étais une boussole folle qui ne savait pas où pointer, maintenant tout a un nord, un sud, un est, un ouest, un intérieur, un extérieur.

La nuit et le jour mangent mon visage et je mange la nuit et le jour, je suis un animal émerveillé.

Les choses sont précises , ciselées sous la lumières, j’éclate de rire au moindre rayon de soleil.

Tout s’ouvre , on m’a dit le mot de passe.

Je comprends , je comprends les oiseaux.

Mes questions sont englouties sous une joie épaisse, elles n’ont plus lieu d’être , elles sont devenues des jours fériés.

Voir le jour se lever est une fête respirer est une fête une vraie fête, avec l’ivresse, les rencontres, les surprises, les nourritures englouties les doigts dans la bouche, les couleurs flageolantes, les confettis, les transgressions.

Tout ruisselle d’une liberté ivre, moi-même je n’ai plus besoin de parler , je regarde, je souris, j’acquiesce au monde.

Je suis en train de tomber en amour et c’est une chute tellement, tellement libre. »

A propos de la hiérarchie des centres, les mesures de protection de la première vidéo pouvaient évoquer en partie un 6 mu, avec la mobilisation du carrelage et des bouteilles, tandis que la connotation émotionnelle du deuxième relève de l’évidence dans le contexte de rencontre amoureuse. Le troisième texte pourrait permettre de trancher, et selon moi la balance penche du côté du 6 alpha.:wink:

Là encore, je retranscris le texte dans sa quasi intégralité, la majeure partie des éléments que j’ai soulignés pointent un vocabulaire et des stratégies mentales (dans une situation de fatigue requérant avant tout l’instinctif et de chagrin d’amour requérant l’émotionnel).

L’humour est constamment présent, il y a une mention à la prudence, ainsi qu’un appel à lâcher prise, en faveur du non contrôle.

Brisé, brisé

« Tout m’échappait, tout me tombait des mains. C’est que mes mains aimaient les métaphores au moins autant que moi et voyant que j’apprenais doucement à respirer, dans le glissement, dans le non contrôle du tout, dans le rien compris mais tant pis , mes mains me faisaient des farces et tous les objets que je tenais se retrouvaient d’une façon ou d’une autre sur le sol. L’assiette avec le riz à la sauce tomate, le verre de lait, la guitare… je grognais en glissant, en sursautant, en me tachant, en nettoyant les morceaux et en remettant tout dans les boîtes et les placards, et ça m’échappait à nouveau les placards dégringolant et c’était à chaque instant une pluie de petites choses sur mes pieds.

C’est comme ça que j’ai compris qu’il me fallait du repos.

… j’ai réfléchi à ce que je pouvais faire pour me reposer.

Je suis partie acheter des crayons de couleurs, j’ai pensé à des choses symboliques pour multiplier le repos : manger des chips dans mon lit, ou regarder un dessin animé dans la baignoire, j’ai pensé « on peut plus prendre un bain y a pas assez d’eau chaude et la bonde ne tient plus mais je peux m’emmitoufler dans la couette et aller dans la baignoire avec un ordinateur et des chips ».

Bravo monsieur Cerveau , décidemment dès qu’on parle de repos vous avez une productivité étonnante !

Rien que de penser à ça, ça me faisait rire, d’un rire reposant.

Je suis rentrée avec des crayons blancs et argentés dans la poche, les couleurs c’était trop fatigant et puis c’était des crayons joyeux, des crayons pour signer par-dessus les couleurs de mes albums….

[…]

J’ai souri dans ma fatigue, dans cet épuisement de toutes ces choses traversées. Ce n’était pas que ça je le savais bien, c’était aussi mon drôle de cœur brisé.

J’ai pensé, J’ai pensé ça et ça m’a paru sonner faux, j’ai tapé dessus toc toc toc, mais non, c’était creux cette expression « cœur brisé », « Quelle drôle de façon de dire un chagrin !», j’ai pensé en mangeant mes chips dans mon lit.

On dit avoir le cœur brisé comme un objet qui ne marche plus, comme l’assiette de riz à la sauce tomate en mille morceaux saignant autour de mes pieds, brisé comme un réveil sur lequel on a tapé trop fort.

Mais mon cœur à moi il n’est jamais brisé au contraire c’est parce qu’il marche très très bien, qu’il s’enthousiasme, qu’il se lance, s’expérimente et se donne et se reforme à chaque instant, un cœur auto renaissant à chaque seconde.

A la limite, un peu perdu, on sait plus trop trop dans quels bras on l’a confié, si ce serait plus prudent de le reprendre.

[… ]

La machine à espoir ça peut pas s’encrasser, ça c’est autonettoyant.

Parfois on voudrait faire une tragédie, mais vraiment tu sais c’est pas mon genre, ça m’ennuie tu sais les grands mots, moi j’aime les petits mots empilés les uns sur les autres, non je mens , moi j’aime démesurément les grands mots, ce que je n’aime pas ce sont les mots qui se prennent pour autre chose, non je mens à nouveau , décidemment les mots qui se prennent pour des vers de terre ou des éléphants ça j’aime vraiment beaucoup, non ce que je n’aime pas ce sont les mots en costume, les mots en nœud papillon, quoique si, ils sont rigolos , embourbés dans leurs grandes échasses incompréhensibles. Moi j’ai des dictionnaires de chimie récupérés dans les poubelles, de temps en temps je les lis quand j’ai pas le moral , ça me fait énormément rire toutes ces molécules très sérieuses - ah quelle difficulté de trouver des mots non aimables, j’ai le cœur qui marche bien tu vois c’est le meilleur des repos je laisse mon cœur faire j’écris tout ce qui me passe par la tête et je ramasse doucement tout ce que j’ai fait tomber.

C’est le meilleur des repos… Et si jamais ça m’échappe à nouveau. Si vraiment ça veut aller ailleurs. Si c’est plus heureux enfui ou cassé comme ça… Si tout m’échappe… c’est comme ça. »